Ejaculation précoce

Ces vingt dernières années ont vu une avancée des connaissances médicales basées sur des preuves concernant l’Ejaculation Prématurée (EP). A l’heure de la sortie en France du premier médicament à avoir une autorisation de mise sur le marché (AMM) dans le traitement de l’EP, voyons ce qu’il en est de ce problème et de son traitement.

Pourquoi faut-il soigner l’EP ?

L’EP est la dysfonction sexuelle masculine la plus fréquente. Elle touche environ un tiers des hommes à divers moments de leur vie, sans grande variation selon l’âge et les continents. De nombreuses études ont mis en évidence qu’elle entraînait une très importante souffrance chez l’homme bien sur, mais aussi chez la partenaire et le couple. L’EP a un très fort impact sur la qualité de vie des hommes en général, en particulier sur la satisfaction sexuelle qui est très diminuée. L’EP retentit aussi très fortement sur la confiance en soi et l’estime de soi.

Ce problème impacte aussi sur la sexualité féminine. Du reste, les hommes souffrant d’EP éprouvent souvent une immense culpabilité vis-à-vis de leur partenaire. Des difficultés de communication peuvent apparaître dans le couple tant les deux partenaires ont du mal à aborder le problème : la femme parce qu’elle a peur de plonger son homme dans une anxiété d’échec, de lui faire de la peine et de le vexer et l’homme parce qu’il choisit plutôt le déni et l’évitement. Les rapports sexuels s’espacent (« tu vas encore éjaculer trop vite, à quoi bon essayer ? »), ce qui augmente davantage la rapidité de l’éjaculation et peut entraîner le couple dans une crise.

Comment définir l’EP ?

Elle est définie ainsi par la Société Internationale de Médecine Sexuelle : l’EP est une dysfonction sexuelle masculine caractérisée par une éjaculation qui survient toujours ou presque toujours avant ou au plus environ une minute après la pénétration vaginale, par une incapacité à retarder l’éjaculation lors de toutes ou presque toutes les pénétrations vaginales et par des conséquences négatives personnelles, telles que souffrance, tracas, frustration et/ou évitement de l’intimité sexuelle. On distingue deux principales formes cliniques : l’EP primaire où l’éjaculation est très rapide, suivant de peu ou parfois précédant la pénétration, quasi systématique pour tous les rapports sexuels, avec toutes les partenaires, depuis le début de l’activité sexuelle. Concrètement, le plus fréquemment, ce sont des hommes, essentiellement jeunes et inexpérimentés, éprouvant une forte angoisse de performance. Ils ont moins de 30 ans, et ils ont un manque d’apprentissage évident. Ces jeunes hommes ont souvent une masturbation culpabilisée, et ils sont habitués à décharger rapidement leurs tensions par masturbation.

L’EP secondaire survenant après une période de vie sexuelle où l’éjaculation ne posait pas de problème. Ce changement peut être du à des évènements de vie retentissant sur la vie intime (par exemple l’arrivée d’un enfant), à des problèmes d’ordre psychologique, relationnel ou médical. Dans ce cas, c’est souvent lié à un trouble de l’érection. (L’homme recherche alors une excitation maximale pour obtenir et maintenir une érection qu’il a peur de perdre et, de ce fait, il précipite la survenue de son éjaculation).

A côté de ces deux principales formes cliniques,  il y a aussi des hommes se plaignant alors que tout est normal au niveau de leur délai d’éjaculation. Ce sont des hommes ayant en tête des performances déconnectées de la réalité sexuelle. Peut-être faut-il chercher du côté de la pornographie avec ses acteurs « éjaculateurs retardés ou anéjaculateurs ». Dans ce sens, les films X entraîneraient une pression de conformité à une norme imaginaire.

Quelles sont les causes de l’EP ?  

Toutes les recherches effectuées mettent en exergue deux dimensions permettant d’expliquer cette pathologie. La première est sexologique et l’autre neurochimique.

  • La dimension sexologique est basée sur un manque d’habiletés sexuelles permettant de gérer l’excitation sexuelle. Concrètement, le patient ne peut pas conserver son excitation à des niveaux inférieurs à celui qui déclenche le réflexe éjaculatoire et il est alors incapable de prolonger la durée de la pénétration.
  • La dimension neurochimique est basée sur des travaux concernant le rôle clé d’un neuromédiateur cérébral : la Sérotonine. L’EP serait liée au fait que l’on ne trouve pas suffisamment de sérotonine active dans les espaces intersynaptiques.

Comment soigner l’EP ?

La prise en charge thérapeutique de l’EP dérive de ces deux dimensions. Bien sur, ses modalités sont  variables selon les individus et les situations mais, le plus souvent, l’EP répondra à  un traitement combiné, associant une thérapie  sexologique à un traitement pharmacologique.

Plusieurs sexothérapies comportementales existent visant à faire acquérir au patient   des habiletés dans sa chorégraphie sexuelle lui permettant de moduler son excitation. Les protocoles les plus classiques sont le « Stop and go » ou « arrêt-départ » (Le principe est de décomposer l’excitation en paliers et de s’arrêter à ces paliers),  les compressions ou « Squeeze » (Le principe est d’enseigner à l'homme, par différentes compressions, à faire diminuer son excitation alors qu'il est sur le point d'éjaculer) et la thérapie sexofonctionnelle (Le principe est de gérer l'intensité de la stimulation que l'homme reçoit et les modifications entraînées par l’excitation notamment la respiration et les tensions musculaires).

Le traitement pharmacologique repose sur l’utilisation d’un Inhibiteur de la recapture de la sérotonine qui permet d’avoir une efficacité rapide sur le symptôme utile pour motiver le patient, indispensable en cas d’EP sévère (moins d’une minute) pour mettre en place une possibilité d’acquisitions d’habiletés ou lorsque le couple est en crise et à la demande d’un résultat rapide.

Conclusion

Chaque patient souffrant d’une EP a la possibilité de la soigner. Pour cela, il doit dépasser la gêne et la honte à consulter. L’EP est le plus souvent une pathologie qui concerne le couple et l’inclusion de la partenaire dans la démarche de soins est le plus souvent utile. Chaque patient doit pouvoir bénéficier d’une éducation psychosexuelle de base. Le praticien dispose aujourd’hui de différents traitements et peut offrir à chaque patient et à chaque couple une intervention psychosexologique appropriée, seule ou en complément d’une pharmacothérapie.